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Une vision africaine de l’Eglise et du sida

Une vision africaine de l’Eglise et du sida

L'Eglise catholique est la principale organisation en Afrique pour l'assistance aux malades du sida, et pour les hommes, les femmes et les enfants africains atteints de cette maladie, l'Eglise n'est pas simplement un organisme prestataire

de services – elle est une Mère.

C'est l'impression que partage le père jésuite Michael Czerny, fondateur du réseau jésuite africain contre le sida (AJAN, African Jesuit AIDS Network), installé à Nairobi. Ce prêtre canadien a fondé ce réseau en 2002 dans le but d'aider les jésuites en Afrique à faire face au problème du VIH/SIDA. A présent, le père Czerny est à Rome, où il est assistant personnel d'un des Africains les plus en vue au Vatican : le cardinal Peter Turkson, président du Conseil pontifical Justice et Paix.

Dans cette interview accordée à l'émission de télévision « Là où Dieu pleure », le père Czerny explique comment l'Eglise prend soin des malades du sida et pourquoi son travail est si peu reconnu.

Q : Qu'est-ce qui vous a amené à travailler au problème du VIH ?

Père Czerny : Je travaillais comme secrétaire pour la Justice sociale à notre quartier général (curie généralice) jésuite à Rome. Au tournant du nouveau millénaire, des jésuites en Afrique ont tiré la sonnette d'alarme sur la pandémie du sida. Et c'est ainsi que, ici à Rome, nous avons travaillé pendant deux ans avec nos collègues d'Afrique pour élaborer une approche, et cette approche a été d'inclure un réseau de soutien, d'encouragement et de sensibilisation. Voici comment, au milieu de 2002, est né le réseau jésuite africain contre le sida (AJAN) et que j'ai laissé mon travail à Rome pour partir à Nairobi et diriger le réseau.

Qui vous vient à l'esprit quand vous pensez au SIDA ?

Parfois je songe aux premières personnes que j'ai vu tellement souffrir au Canada, dans une telle angoisse et confusion, à la fin des années 80 et au début de 90, mais à présent je pense à différentes personnes en Afrique.

J'aurais peut-être une pensée particulière pour Rosanna, une jeune femme séropositive, qui a mis au monde un premier enfant sain puis une petite fille séropositive qu'elle a perdue, et qui ensuite a été abandonnée par son mari, rejetée par sa famille et qui se bat pour élever son petit garçon. Elle vit de façon aussi positive que possible, bien décidée à vivre aussi longtemps qu'elle pourra pour voir son fils à l'école et prendre un bon départ dans la vie. Je l'admire et, pour moi, elle est le genre de personne qu'on aimerait, dans un certain sens, promouvoir. Nous espérons que toutes les personnes atteintes du sida puissent avoir l'attitude positive de Rosanna.

L'Eglise catholique est souvent publiquement dénigrée pour ses positions sur le sida et, cependant, peu de gens savent le travail important qu'elle accomplit en fournissant une assistance aux malades du sida. Pouvez-vous nous dire quelques mots là-dessus ?

Certainement. L'Eglise universelle est la principale organisation à prendre soin des personnes séropositives et malades du sida, notamment les veuves, orphelins et autres qui portent ce fardeau. Le travail accompli par l'Eglise est donc vaste et varié. Sur le plan médical, l'Eglise dans le monde offre 25% des services liés au sida. Je crois que la moyenne en Afrique est plus proche des 40%, peut-être même 50%. Plus on s'éloigne des grandes villes, plus le chiffre se rapproche de 100%. Souvent, les seuls services pour le sida dans les zones reculées sont les cliniques catholiques.

Qu'entendez-vous par fournir une assistance ?

Puisque le VIH ou sida n'est pas seulement une infection ou maladie, mais aussi un problème considérable culturel, personnel, familial, social et spirituel, ce que l'Eglise réussit à faire et dont, je crois, nous pouvons être fiers en tant qu'Eglise, est de traiter la personne dans son intégralité, et pas seulement l'infection – pas seulement l'aspect médical. Ainsi, une personne séropositive peut se tourner vers l'Eglise pour recevoir toute une gamme de soins et de soutien qui peuvent se résumer à être acceptée comme personne et encouragée à continuer à vivre une vie aussi pleine que possible, aussi longue que possible, et ne pas permettre que le VIH/Sida soit une sentence de mort.

Comment les Africains voient-ils ce travail d'assistance de l'Eglise ?

Je pense que nombre d'Africains diraient : « L'Eglise a été avec nous avant le sida. L'Eglise est maintenant généreusement avec nous durant le sida et l'Eglise sera avec nous après le sida ». En ce sens, l'Eglise n'est pas vue tant comme un organisme qui fournit des projets ou des services, mais comme cette réalité que nous appelons « Mère » : la mère qui est là, a toujours été là et sera là tant que nous en aurons besoin.

Comme vous savez, l'Eglise en Afrique se définit elle-même la famille de Dieu en Afrique ; c'est la définition donnée au premier synode sur l'Afrique et je dirais que l'Eglise affronte le VIH et le sida, comme dans une famille. Nous essayons de faire en sorte que tous sentent qu'ils font partie d'une famille, qu'ils aient besoin de soins ou qu'ils soient en position d'offrir un quelconque type d'assistance.

Vous avez évoqué une fois Matthieu 8 :3 – Il étendit la main et le toucha, en disant « Je le veux, sois purifié ». Et aussitôt sa lèpre fut purifiée – comme exemple de l'approche de l'Eglise vis-à-vis de l'infection du sida. Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez choisi cet exemple particulier ?

Volontiers. Vous aviez ce lépreux qui, avant tout, osa s'approcher de Jésus – ce qui en soi était contraire à la loi – et le défia en l'interpellant : « Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier », et Jésus fit deux choses. Il dit : « Je le veux » et il étendit la main, le toucha, et le guérit.

Cette très courte scène concentre beaucoup des dimensions de l'assistance aux malades du sida, du véritable ministère pastoral. La première est « Bien sûr que je le veux », qui est cet empressement à aider. Celui qui se trouve en grande difficulté et profondément bouleversé, et peut-être très cruellement rejeté par ceux sur lesquels il a toujours compté, peut se tourner vers l'Eglise en sachant qu'il recevra une réponse positive. Que personne ne le jugera, qu'il n'y aura aucun calcul, et que la réponse sera : « Bien sûr que je le veux ». Ensuite, nous tendons la main et touchons. Tel est, je crois, le geste le plus essentiel en réponse au sida.

Ainsi le Christ, à travers l'Eglise, a touché des personnes ?

Une personne qui a appris, depuis peu, qu'elle est séropositive se sent comme morte, privée de son humanité, et malheureusement la société, la culture et parfois même la famille la traitent comme si elle était morte. Ils disent : « Tu n'existes plus pour nous, tu es morte. Va-t'en, on ne veut plus te voir ». La personne se sent alors morte, déshumanisée et rien ne pourra la convaincre du contraire dans cette situation. Songeons aussi à la souffrance d'un enfant qui a des problèmes, et à l'effet sur son humanité, sa valeur et sa dignité lorsqu'il est touché, embrassé. En outre, il existe un fort tabou culturel et médical contre le fait de toucher un lépreux. Jésus a brisé ce tabou, en se souciant moins du danger de la contamination que de tendre la main à la personne, de la toucher et de la guérir.

Et c'est ce que les gens diront : « Quand j'ai découvert que j'étais séropositif, j'étais mort et maintenant je me sens vivant ». Et certains iront jusqu'à dire : « Avant de devenir séropositif, ma vie était un gâchis. Je gâchais ma vie par mon comportement. Maintenant, malheureusement je suis séropositif, mais maintenant je vis vraiment, je vis de façon responsable pour ma famille – si j'en ai une – et pour les autres ».

Le pape Benoît XVI a déclenché une polémique quand il a dit que le préservatif n'est pas la solution au problème du sida en Afrique. Pourquoi cette controverse ? Que s'est-t-il passé ?

Il existe une « vérité » à laquelle les gens s'accrochent, à savoir que si un couple décide d'utiliser le préservatif et que l'un d'eux est séropositif, s'ils l'utilisent systématiquement et correctement, ils réduiront le risque de contamination. C'est vrai dans le cas d'un couple. Mais alors les gens pensent : « Bon, si le préservatif fonctionne bien pour un couple, alors un million de préservatifs pourront fonctionner pour la population d'une ville ou d'une cité », mais ce n'est pas vrai.

Les statistiques confirment qu'une stratégie de prévention basée sur une distribution massive de préservatifs ne donne pas les résultats escomptés. Elle ne réduit pas les taux, et c'est ce que dit le Saint-Père. Il n'a pas nié qu'un préservatif puisse être utile dans certains cas. Ce qu'il a dit, c'est que la promotion des préservatifs, comme principale stratégie de prévention, n'est pas efficace, n'atteint pas son objectif, ne fait pas baisser le taux de VIH dans la population. Mais les gens se sont excités parce qu'ils n'ont pas écouté attentivement ce que le pape a dit, ils n'ont pas étudié ses paroles et ne se sont pas bien informés, et aussi parce qu'il y a beaucoup d'idéologie, d'émotion et d'intérêts derrière toute cette question. C'est pourquoi la polémique s'est déchaînée.

Le Dr. Edward Green, directeur du Projet de recherche pour la prévention du Sida au Centre de Harvard d'études des populations et du développement, a déclaré qu'en tant que scientifique, il a été très surpris de constater la similitude entre ce que le pape a dit au Cameroun et les résultats des plus récentes découvertes scientifiques. Il a affirmé que le préservatif ne prévient pas le sida ; seul un comportement sexuel responsable peut constituer une réponse à la pandémie.

Vous avez mentionné brièvement la question de l'idéologie. S'agit-il aussi d'une divergence de valeurs entre notre sexualité – le mode de vie qui est le nôtre dans la civilisation occidentale – et les valeurs culturelles des autres continents comme celui africain ? Y a-t-il un fossé culturel qui se crée ?

Oui, il y a un décalage par rapport à ce que la culture mondialisée considère maintenant normal ou acceptable : la culture des médias, de la publicité, du marketing. Ces valeurs entrent en forte tension avec les valeurs traditionnelles catholiques et les valeurs traditionnelles africaines.

Peut-être pourrions-nous résumer la valeur culturelle de la culture mondialisée en matière de sexualité comme le « dogme » – et je dirais la promotion – de l'idée du consentement mutuel. Autrement dit, la norme pour le comportement sexuel est le consentement des deux sujets, s'ils sont majeurs et librement consentants, il n'existe pas d'autre norme applicable. C'est, je pense, l'idée maîtresse que la mondialisation promeut en matière de sexualité. Du moment que vous et l'autre êtes d'accord, tout est très bien et personne ne peut le remettre en question.

L'idée que nous avons dans l'Eglise et l'idée que nous avons en Afrique est qu'il existe d'autres normes et que ces normes ne dépendent pas seulement de vous et de moi : elles dépendent de notre famille, notre communauté, notre paroisse, notre pays, peut-être même de notre tribu. L'idée est contestée parce qu'en Afrique, et dans la morale catholique traditionnelle, ce n'est pas simplement le fait que vous et moi soyons d'accord qui justifie notre comportement, il y a d'autres normes, et ces normes visent à orienter ce que vous et moi devrez faire, ou ne pas faire, à des moments donnés de notre vie avec certaines personnes. La différence est donc très nette.

Il n'en a pas été question dans le cadre de la controverse, mais je suis convaincu que là est le véritable problème : que le pape représente un ensemble de normes sur la sexualité que nous ne voulons pas accepter parce qu'elles sont plus exigeantes. Elles sont aussi plus vivifiantes et, en fin de compte, produisent plus de bonheur. Mais à court terme, elles exigent davantage que simplement se mettre d'accord à deux sur ce qu'on veut faire.

Donc, abstinence. Fidélité. Ce sont, en effet, les choses que les évêques africains ont formulées : c'est le chemin vers un plus grand bonheur, un plus grand bien ?

C'est bien ça. Nous disons ceci non parce que nous y avons pensé hier, mais parce que c'est le fruit de notre expérience, une expérience qui est propre à toute culture sérieuse ; parce que la sexualité est un grand don, une chose merveilleuse qui, pour pouvoir être appréciée et utilisée correctement, exige une discipline, exige des normes, exige de reconnaître que tout n'est pas toujours possible. Ceci vient d'une antique sagesse humaine, mais qui va à l'encontre des principes de plaisir et de marketing. D'où un conflit.

N'éprouvez-vous jamais de la colère ou de la frustration due à ce que, peut-être, vous pourriez considérer comme une approche aberrante, si nous comprenons que la solution du préservatif n'est pas la solution – c'est beaucoup d'argent, beaucoup de temps et d'efforts orientés dans une direction qui ne semble pas fournir les bonnes réponses ?

C'est vrai. Malheureusement c'est ainsi, mais ce n'est pas une raison pour se mettre vraiment en colère. Le fait est que le VIH est un défi pour tout le monde et, en Afrique, un défi qui touche pratiquement toutes les communautés et, dans certains endroits, toutes les familles. Je pense qu'il faut du temps pour y faire face. Certainement, la promotion massive du préservatif fait des ravages. Elle ne résout pas le problème et n'aide pas à le résoudre, mais ce n'est malheureusement pas le seul exemple d'approches aberrantes imposées à l'Afrique, et l'Afrique a survécu à d'autres mesures erronées et elle survivra aussi à celle-ci.

Mon espoir est qu'avec le type d'enseignement que nous a donné le Saint-Père, nous ferons des progrès et le progrès consiste, accessoirement, dans l'amélioration des statistiques. Le vrai succès est lorsque des jeunes sont capables de vivre leur sexualité de façon plus responsable. Quand on voit des couples mariés qui vivent leur sexualité de façon plus responsable, et quand, comme je l'ai dit, la famille de Dieu affronte le sida comme une famille, alors il devient, je crois, le signe que Dieu est à l'œuvre en Afrique.

Propos recueillis par Mark Riedemann, pour l'émission télévisée « La où Dieu pleure », conduite par la Catholic Radio and Television Network (CRTN), en collaboration avec l'association Aide à l'Eglise en Détresse (AED).

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عن الاتحاد الكاثوليكي العالمي للصحافة - لبنان

عضو في الإتحاد الكاثوليكي العالمي للصحافة UCIP الذي تأسس عام 1927 بهدف جمع كلمة الاعلاميين لخدمة السلام والحقيقة . يضم الإتحاد الكاثوليكي العالمي للصحافة - لبنان UCIP – LIBAN مجموعة من الإعلاميين الناشطين في مختلف الوسائل الإعلامية ومن الباحثين والأساتذة . تأسس عام 1997 بمبادرة من اللجنة الأسقفية لوسائل الإعلام استمرارا للمشاركة في التغطية الإعلامية لزيارة السعيد الذكر البابا القديس يوحنا بولس الثاني الى لبنان في أيار مايو من العام نفسه. "أوسيب لبنان" يعمل رسميا تحت اشراف مجلس البطاركة والأساقفة الكاثوليك في لبنان بموجب وثيقة تحمل الرقم 606 على 2000. وبموجب علم وخبر من الدولة اللبنانية رقم 122/ أد، تاريخ 12/4/2006. شعاره :" تعرفون الحق والحق يحرركم " (يوحنا 8:38 ).